L’effondrement de la Silicon Valley Bank la semaine dernière met en évidence un problème plus vaste dans le secteur bancaire américain : des pertes potentielles non réalisées de 620 milliards $US.
De nombreuses banques américaines doivent maintenant composer avec un écart grandissant entre la valeur que les grands prêteurs accordent aux obligations qu’ils détiennent et ce que ces obligations valent réellement sur le marché.
La chute de la Silicon Valley Bank est liée, en partie, à la chute de la valeur des obligations qu’elle avait acquises au cours des dernières années lorsqu’elle recevait beaucoup de dépôts de clients et qu’elle avait besoin d’un «endroit» pour garer tout cet argent.
La chute de la Silicon Valley Bank a commencé mercredi soir dernier, lorsqu’elle a surpris les investisseurs en leur annonçant qu’elle devait lever 2,25 milliards $US pour consolider son bilan.
La Silicon Valley Bank n’est pas la seule institution à avoir ce problème. Les banques américaines étaient assises sur 620 milliards $US de pertes non réalisées (des actifs dont le prix a baissé mais qui n’ont pas encore été vendus) à la fin de 2022, selon la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC).
Comment tout cela est arrivé ? Lorsque les taux d’intérêt avoisinaient le plancher près de zéro, les banques américaines ont récupéré de nombreux bons du Trésor et obligations.
Or, depuis que la Réserve fédérale (Fed) a décidé d’augmenter rapidement ses taux pour lutter contre l’inflation, ces obligations ont perdu de la valeur.
Lorsque les taux d’intérêt augmentent, les obligations nouvellement émises commencent à payer des taux plus élevés aux investisseurs, ce qui rend les obligations plus anciennes à taux plus bas moins attrayantes et moins précieuses.
Le résultat est que la plupart des banques ont d’importants montants de pertes non réalisées à être inscrits dans leurs livres.
«L’environnement actuel des taux d’intérêt a des effets dramatiques sur la rentabilité et le profil de risque des stratégies de financement et d’investissement des banques», a déclaré le président de la FDIC, Martin Gruenberg, en marges des rencontres à l’Institute of International Bankers la semaine dernière.
«Les pertes non réalisées affaiblissent la capacité future d’une banque à répondre aux besoins de liquidités inattendus», a-t-il ajouté.
En d’autres termes, les banques pourraient constater qu’elles ont moins de liquidités qu’elles ne le pensaient – surtout lorsqu’elles en ont besoin – parce que leurs titres valent moins que ce à quoi elles s’attendaient.
Chemin faisant, de nombreuses institutions (des banques centrales, des banques commerciales et des fonds de pension, etc.) sont assis sur des actifs qui valent nettement moins que ce qui est indiqué dans leurs états financiers.
Les pertes qui en résulteront seront importantes et devront être financées d’une manière ou d’une autre.
Pas de panique
Il n’y aurait toutefois pas lieu de paniquer, selon des analystes.
«La baisse des prix des obligations peut être un problème si votre bilan s’effondre assez rapidement et que vous devez vendre des actifs que vous n’auriez pas à vendre normalement», précise le gestionnaire Luc Plouvier chez Van Lanschot Kempen, une société de gestion de fortune néerlandaise.
La plupart des grandes banques américaines sont en bonne santé financière et ne se retrouveront pas dans une situation où elles seront obligées de réaliser des pertes sur obligations, a tenu à préciser le président de la FDIC, Martin Gruenberg.
Le secteur bancaire sera toutefois à surveiller de près à la Bourse au cours des prochains jours alors que les investisseurs pourraient démontrer des signes de nervosité.
Les actions des grandes banques américaines se sont stabilisées vendredi dernier à la Bourse après avoir plongé jeudi dans leur pire journée en près de trois ans.
Sources : Reuters, CNN Money, Yahoo Finance, CNBC
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